La France dans le Bon Sens

18 septembre 2006

1 Euro: le début de la fortune!...et de la fiscalité?

Réflexions sur la fiscalité au service de la cohésion sociale

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L’impôt, notamment l’impôt direct sur les personnes physiques, a deux rôles indissociables, dont on
peut craindre qu’on ait oublié que l’un (la création de ressources destinées à favoriser le bien collectif) est la conséquence de l’autre (l’appartenance consciente des ménages à une collectivité).L’impôt c’est en effet d’abord un moyen d’établir l’allégeance d’un citoyen à une collectivité représentée par la Ville, la Région ou l’Etat (auparavant le Seigneur) qui lui doit en contrepartie des prestations destinées à assurer l’évolution de son bien-être : Protection (physique et sociale), Formation/Enseignement (et pas l’Education qui relève de la famille), Equipement (voies de communication, loisirs, …), Justice, etc…

Le rappeler n’est pas une simple banalité car le débat public n’évoque jamais cette dimension au profit de celle, beaucoup riche en polémique (donc en médiatisation), de l’emploi approprié des revenus fiscaux des collectivités. Or la prise de conscience de cette dimension par un plus grand nombre profiterait à l’exercice de la démocratie qui n’a pas que le suffrage universel comme moyen d’expression.


Malheureusement, comment peut-on imaginer dans cette même démocratie et ce modèle social unique au monde -dont d’aucuns sont très fiers- engager un débat alors que près de 55 % de la population est exonérée de participer aux ressources de l’Etat (via l’IRPP), au titre de revenus qualifiés d’insuffisants.

La question n’est pas celle des revenus, mais d’un respect mutuel du contribuable et de l’Etat : remplir une déclaration de revenus est le seul moment, annuel, de dialogue d’un citoyen avec son Etat : cela nécessite une certaine attention et devrait avoir pour conséquence de conduire le même déclarant à participer financièrement un tant soit peu à cet acte (Ne serait-ce que pour couvrir les frais directs causés par le traitement de sa déclaration, dût-elle conduire à l’appel d’une somme symbolique !)

Car, contribuer financièrement à cette allégeance serait sain à plusieurs titres :

¨ La mention du coût de traitement des déclarations permettrait d’en espérer pour chacun l’augmentation de sa productivité et obligerait l’administration à en rendre compte (et dans un premier temps à s’en expliquer…).

¨ La participation de TOUS sous réserve d’une progressivité évidemment raisonnable (qui pourrait représenter la valeur de quelques billets de Loto) pour tenir compte de la réelle modestie des revenus les plus bas, éviterait de créer une classe des exonérés (qui d’ailleurs grâce à çà bénéficie d’avantages supplémentaires) auxquels « on doit » quelque chose et une classe des assujettis qui « doivent » quelque chose aux autres. Mais nous sommes là dans les vestiges de la culture marxiste que notre pays veille plus soigneusement depuis plus de 30 ans que la Russie le tombeau de Lénine, mais on peut rêver que çà change…

¨ Accessoirement ceux qui « doivent » étant devenus plus nombreux, à sommes prélevées égales, les 45 % qui « devaient » précédemment devraient évidemment moins payer. Mais la société y gagnerait une population qui se sentirait moins « vache à lait » et plus consciente que chacun participe comme son voisin à cet espoir de bien être. Car, aujourd’hui, ceux qui « doivent », qui appartiennent souvent aux catégories entraînant la société, n’en ont plus envie et ne comprennent pas qu’ils soient considérés comme le point de mire et les victimes expiatoires des débats spécieux sur les riches et les pauvres. Résultat, l’initiative économique s’amenuise (ou s’expatrie, ce dont on parle vraiment peu) ou l’ardeur au travail mesure soigneusement le poids de la fiscalité marginale pour accepter une progression des revenus et s’éteint souvent vite.


Dans le même esprit, pour faire bonne mesure à ce propos j’ajouterai que la création et surtout le maintien en l’état de l’ISF sont une insulte au bon sens que, là aussi, le consensus crypto-marxiste des 30 dernières années a soigneusement préservé.

Récemment, ma petite fille de 3 ans a trouvé 1 euro dans la rue et m’a dit triomphante : « Papy, t’as vu, j’ai une fortune !!! » Très fier de la richesse de son langage, je me suis en même temps rendu compte combien ce mot avait une valeur relative, selon comment on le regardait

Car, à bien réfléchir, tout le monde qui a une existence fiscale possède sa propre fortune, dès qu’il détient au moins un euro. Pourquoi décréter donc qu’il y a un seuil de gens fortunés (en dessous duquel on ne l’est donc pas, par définition), qui plus est lorsque ceux-ci le deviennent par une appréciation mécanique de leur patrimoine pour cause de spéculation immobilière notamment (cf les propriétaires historiques de terres agricoles de l’île de Ré fiscalisés par la « branchitude » de leur localisation), indépendante de leur effort pour devenir « fortuné »

Là également, en fiscalisant dès le premier euro, on ferait œuvre de participation à un effort de cohésion sociale plus que de solidarité (ce merveilleux terme inventé par la génération des années 80 pour laïciser, étatiser et déresponsabiliser la charité qui accompagnait souvent la contribution sociale et fiscale) et on pourrait même sans grande crainte de contestation espérer retirer de cet impôt, aujourd’hui bien peu productif, un meilleur rendement, les « fortunés » actuels étant moins tentés de dissimuler, voire de s’expatrier.

Pour clôturer ce propos, je terminerai avec une évocation et une proposition :

Si on parlait d’une fiscalité directe généralisée pour financer l’Europe, ne pensez-vous pas qu’on commencerait à parler sérieusement d’Europe et qu’on se poserait les bonnes questions sur la gestion de la Commission et l’élargissement à d’autres pays au lieu de le traiter avec béatitude et technocratie?

Par ailleurs pour rester dans une perspective positive sur l’usage approprié de l’impôt et pour une politique fiscale qui fasse le lit de cette culture de discrimination sociale entre débiteurs et ayant- droits, je pense que la CSG peut offrir une réelle opportunité. Elle peut constituer cet égard un outil remarquable d’équité si on a le courage de ne pas la limiter à la couverture des seuls déficits sociaux, d’en faire l’impôt de référence remplaçant IRPP et ISF et de maintenir le principe d’un assujettissement général sans exceptions dès le premier euro.

Mesdames et Messieurs les prétendants vous en dites quoi ?

Et vous ?


Dominique PAGES
dom.pages2@wanadoo.fr