La France dans le Bon Sens

18 avril 2011

Journalistes.... les nouveaux gardiens de la morale?

JOURNALISTES :
NOUVEAUX PASDARANS DE NOTRE MORALE ?
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Après l’exécutif, le législatif et le judiciaire, la presse (sous toutes ses formes) est souvent qualifiée de 4ème pouvoir. Un phénomène qui ne date pas d’hier, mais auquel la télédiffusion d’abord radio, puis visuelle et enfin électronique donne une dimension toute particulière où se combinent, pour mieux amplifier les émotions qu’elles suscitent, la rapidité, les images et l’écrit (électronique). Et, de fait, la surexposition à laquelle est soumis le citoyen par ce pouvoir a tendance à faire de ce dernier une sorte de référentiel du bien penser pour les 3 autres.
C’est oublier toutefois que, contrairement aux principes soigneusement peaufinés de régulation des autres pouvoirs – constitutionnels, eux – la presse n’a comme étendard de sa légitimité que sa « déontologie » qui n’est même pas, comme chez d’autres corps professionnels (médecins, avocats, …) défendue et régulée par un ordre avec ses instances arbitrales internes. D’ailleurs avez-vous déjà vu un journaliste condamné par ses confrères à un silence médiatique (qui est la peine suprême) ? Au contraire il est sollicité avec bienveillance par tous pour justifier sa turpitude alléguée.
Donc la presse est libre... de presque tout faire ou dire, en quasi-totale impunité (au plus risque-t-elle la diffamation, mais dont elle sait retourner au profit de sa propre notoriété la condamnation qui la frappe -parfois).
Mais, depuis quelques temps, les commentateurs, qu’ils soient humoristes (à la Stéphane Guillon ou Didier Porte), polémistes (comme ceux du Canard enchainé dont c’est le fond de commerce), d’investigation (comme M. Plenel avec Mediapart) ou plus classiquement journalistes éditorialistes (tel Jean-Michel Aphatie) se sont engagés sur la voie de la moralisation active, si ce n’est militante, de notre société. Tel commentaire sur la vie privée de M. Strauss-Kahn, sur le standing de vie parisien de certains serviteurs de la République domiciliés en province ou sur le prix de la mission confiée à tel ou tel deviennent des tribunes pour ne pas dire des tribunaux où l’affirmation du journaliste vaut réquisitoire et jugement en même temps. (Et que dire de la divulgation des propos scandaleux mais privés d’Anelka, dont on ne sait quelle cause cela sert ? si ce n’est évidemment la vente du journal qui a « sorti » cette exclu)
Généralement diffusés à une heure de grande écoute et fortement relayés, ces billets, reportages ou simplement débats traitent l’intéressé comme un « inculpé » (toujours beaucoup plus médiagénique qu’un « mis en examen ») sur la base d’arguties moralisatrices dont on ne sait à quel référentiel (idéologique, moral, religieux, éthique, philosophique) elles se rattachent, ni quelle est l’autorité institutionnelle de celui qui les débite. Et au mieux pour exprimer sa défense l’intéressé n’a-t-il droit qu’à un débat avec un autre … journaliste (corporatistement solidaire de son confrère accusateur/juge). Je ne mentionne pas les droits de réponse en petits caractères publiés quand le mal est fait. Etrange conception de la dialectique, pourtant fondement professionnel de ce métier.
Mais ceux qui jettent la première pierre, entrainant avec eux cohorte de lapidateurs trop contents de cette audace initiale pour leurs propres papiers, sont-ils eux-mêmes prêts à exposer leurs moeurs, leur mode de vie, les pratiques professionnelles qui étayent leurs libelles ou tout simplement le cumul de leurs « ménages » ? A moins qu’une telle investigation ne soit qualifiée d’une atteinte rédhibitoire à leur liberté et ne soit présentée comme un prétexte pour disqualifier la profondeur ou la pertinence de leurs analyses.
Quand verra-t-on un représentant dûment encarté de ce 4ème pouvoir invité à s’exprimer sur les conséquences que ses propres faiblesses (après tout bien humaines), son appartenance confessionnelle, philosophique ou politique peuvent avoir sur la qualité de ses investigations ou de ses éditoriaux ? Avec comme débateurs, des représentants des autres pouvoirs rompus, eux, à l’expression argumentée et dialectique de leur position !
Peu de chances malgré tout car la peur des représailles serait plus forte que le souci d’un juste équilibre des forces et d’une relativité de la vérité. A croire que l’ego est un puissant catalyseur du compromis.
Dominique PAGES
dompages@gmail.com
Juin 2010